« À quoi je sers ? », interpelle débonnaire Pierre Pelouzet, à qui n’a pourtant pas été posée la question, « tout simplement à créer du lien, à restaurer de la confiance pour avoir des … ». Les dirigeants des TPE et PME rêveraient d'achever la phrase. Des relations professionnelles partenariales normales ? Des liens de cotraitance plus collaboratifs ? Des rapports plus équilibrés fondés sur des intérêts mutuels ? Une sociabilité où les termes gonflés à l’égo de donneurs d’ordre et sous-traitants seraient laminés au pied de biche …
« Elle n’est pas toujours là, la confiance, selon l’état des lieux que l’on fait au quotidien », poursuit le médiateur national des entreprises*, homme de Bercy mais Marseillais d’origine. On a quelques petits sujets et cela s’appelle retard de paiement des factures, rupture brutale de contrat, spoliation de propriété intellectuelle, variations diverses et variées du cahier des charges sans compensation … tout cela cumulé crée un esprit de défiance ». Et la somme d’attentes trahies finit par avoir un impact sur l’économie du pays, signifie-t-il.
Devant l’ex-chargé des relations inter-entreprises, à l’origine de la charte de la relation fournisseurs responsables, du label du même nom, de la médiation des marchés publics… , pas de dirigeants de PME mais un parterre de 40 « grands acheteurs » du secteur privé et public issus des entreprises les plus en vue du département, ceux qui occupent la fonction devenue sans doute la plus stratégique au sein de l’entreprise parce qu’elle est sa direction assistée pour défendre son positionnement concurrentiel : les achats.
Ils ont été conviés par la CCI Marseille Provence pour un exercice d’un genre particulier : participer par petites groupes d’une dizaine de personnes en version « world café » à des ateliers de co-construction (plusieurs dans le temps, la première en juin au Palais de la Bourse, la seconde en juillet) dont la finalité est de parvenir à un « Metropolitan business act », un guide fléchant des comportements d’achats plus vertueux en vue de ne pas exclure systématiquement les PME sous prétexte qu’elles seraient une classe d’actifs plus risqués (solvabilité financière, pérennité) ou pas suffisamment fiables (respect des délais).
« L’idée est de passer au crible les pratiques actuelles - favorisant ou freinant l’achat auprès des entreprises du territoire – afin d’imaginer les solutions à actionner pour que se développe le réflexe local », introduit Nicolas Chabert, membre élu à la CCI Marseille Provence, qui s’est beaucoup investi dans le dossier aux côtés de Delphine de France, vice-présidente en charge de l'innovation à la CCIMP dont l’engagement en faveur de la RSE est connu, une thématique voisine des thématiques de l'achat responsable.
« La finalité est co-construire ensemble ce que sera notre manière d'acheter demain sur ce territoire, rassemble l’ex-président du CJD Marseille, qui veut profiter du grand événement de rentrée de l’UPE 13 (Medef local) pour évangéliser sa démarche auprès de l'ensemble des acteurs économiques. « Ce document a vocation à être ratifié au dernier trimestre 2017 par l’ensemble des acteurs économiques du territoire » (cf. plus bas, quelques pistes parmi les propositions émises).
Décrisper les donneurs d’ordre à la frilosité parfois légitime
Depuis quelques années, les initiatives se multiplient à la fois pour pacifier des relations que d’aucuns n’hésitaient pas à placer dans la catégorie « maltraitance » (notamment en matière de délais de paiement) et pour développer un biotope favorable à la croissance des TPE et PME.
Guides, forums, rencontres thématiques, chartes, label, nouvelles dispositions réglementaires (formalités administratives allégées pour les PME, exigences revues des marchés publics etc.) apparaissent sur le marché, visant à faire profiter aux PME un peu des milliards d’euros dépensés en achats par les grandes entreprises, État ou collectivités locales.
Les forums, destinés à mettre en relation des start-ups et PME avec des donneurs d'ordres, essaiment partout sur le territoire, et seraient même en passe de supplanter les salons professionnels de sourcing, un format à bout de souffle.
Ici même, les Rencontres Business Industrie du projet Henri, qui permettent un face-à-face entre les donneurs d’ordre (Airbus Helicopters, DCNS, EDF, Thales, Volvo Trucks, SNCF…) investis dans le projet « industrie du futur » du territoire et une quarantaine de PMI et TPI finement sélectionnées par leurs clients donneurs d’ordre (pour leur savoir-faire différenciant, le caractère transférable de leurs compétences, le respect des délais), font recette à chaque édition. La Métropole de Lyon a tenu une quinzaine de rencontres de ce type en 2016, auxquelles ont participé 1 000 entreprise et qui se sont concrétisées par 350 rendez-vous BtoB, indique la collectivité. Opérations bienvenues car pour les start-up, TPE et PME, se faire connaître des grands comptes s'apparente toujours à « un marathon en talons aiguilles » pour reprendre l'expression d'un dirigeant.
Thérapie de groupe entrepreneuriale
Dans cette thérapie de groupe entrepreneuriale, l’association Pacte PME, réunissant 53 grands donneurs d'ordres privés et publics, 21 organisations professionnelles et 20 pôles de compétitivité, présidée par Christophe de Maistre (ex-patron de Siemens France), est à l’œuvre depuis sa création en 2010 pour stimuler toutes formes coopérations entre les deux parties.
La charte Relations fournisseur responsables (RFR), créée en 2010 afin d'inciter les entreprises à adopter des pratiques responsables vis-à-vis de leurs fournisseurs, a été signée à ce jour par plus de 1 800 entreprises et acteurs publics tandis que 36 d'entre eux sont labellisés « Relations fournisseur responsables ». Pacte PME a également lancé récemment le dispositif Pacte Compétences qui donne la possibilité aux PME de bénéficier du soutien des grands groupes dans le domaine du financement, de la stratégie à l'export, à l'innovation, entre autres.
À l’automne, l’association mettra en ligne une plateforme en « mode export » dont l’objectif est toujours le même : connecter les « grandes » avec les « petites » et les « moyennes» , les premières pourront offrir des hébergements sur leurs sites à l’étranger, des retours d’expérience, des conseils..., les secondes, « poster » leurs compétences offrant des opportunités à l’international.
Des résultats tangibles ?
La situation s’améliore à en croire les différents baromètres ou du moins certains indicateurs. Près de 25 % des dépenses d'achat des grands groupes adhérents de l'association seraient désormais orientées vers les PME françaises. Soit un volume d’achats de 22 Md€. Plus de 7 fournisseurs sur 10 interrogés en 2016 dans le cadre du baromètre Pacte PME** déclarent être satisfaits de la qualité de leurs relations avec les grands donneurs d'ordre industriels et financiers adhérents de Pacte PME. Elles sont plus mitigées sur les autres formes d'aides (soutien financier, aide à l'internationale, ouverture de leur carnet d'adresse).
Mais sur le point le plus sensible – les délais des paiements - l’indicateur est passé de 69 % de satisfaction de la part des PME en 2012 à 81 % en 2016. Globalement le délai moyen de paiement a été de 46 jours en 2016 (plus très loin du seuil maximum à 45 jours fin de mois ou 60 jours après émission de la facture fixé par La loi de modernisation de l'économie votée en 2008).
Selon l'Observatoire des délais de paiement, ce sont environ 15 Md€ qui manqueeraint dans la trésorerie des entreprises. Sur ce montant, 5 à 6 milliards auraient dû être payés par les organismes publics, État, collectivités territoriales, centres hospitaliers publics... Le montant du crédit fournisseur s'élèverait, d'après Altares, à 635 Md€, soit cinq fois le montant total des crédits court terme accordés par les institutions financières (120 Md€) et près du tiers du PIB de la France.
Mais pourquoi acheter local ?
Ce serait selon les économistes toute la puissance du tissu industriel allemand, ce fameux Mittelstand, qui force l’admiration en France. Le terme désigne communément ces « kleine und mittlere Unternehmen », entreprises (CA inférieur à 50 M€, moins de 500 salariés) au comportement solidaire et au réflexe coopératif.
« Pourquoi aller chercher loin des compétences que vous avez tout près. C’est une des forces de l’Allemand », confirme Pierre Pelouzet qui y voit une autre vertu : cette solidarité se traduirait notamment par un respect scrupuleux des délais de paiement.
« Local is beautiful », claironnait le Forum RESET 2017, qui s'est tenu en juin dernier au Parc Chanot à Marseille. Signe des temps, le rendez-vous annuel de la communauté RSE a fait du réflexe local - acheter, créer, produire, investir, consommer plus localement - le thème phare de ses rencontres, qu’il identifie comme la tendance lourde des prochaines décennies pour les élus comme pour les entreprises et les marques.
« Depuis la Seconde Guerre Mondiale, nos pays ont focalisé leurs politiques économiques presque exclusivement sur l'export. On redécouvre aujourd'hui, partout dans le monde, l'importance de produire et consommer plus localement, pour des raisons tant économiques, sociales qu'environnementales. Cet indispensable rééquilibrage est porteur d'immenses opportunités d'affaires, de création d'emplois, mais aussi de mieux vivre. Le local, c’est le cadre dans lequel on peut traiter toute la dimension sociale, écologique et économique », expliquait Raphaël Souchier, économiste et auteur du livre Made in local. Emploi, croissance, durabilité : et si la solution était locale ?
Et de citer quelques exemples, à l'instar de l'initiative entreprise par la CCI de Quimper-Cornouaille avec son association Blue economy et initiatives locales (Abeil) sur la base des travaux de Gunter Pauli. L’auteur de L’économie bleue a identifié une centaine de modèles d’affaires « hyper performants » de par le monde, qui se sont développées « sur la base des ressources disponibles localement, avec une mise en œuvre décentralisée, qui créent des emplois en nombre, ne demandent pas de subventions publiques et sans cout écologique supplémentaire ».
Faire changer le système économique
« Il faut réunir un certain nombre de prérequis pour réussir un "made in local". À Nantes-Saint Nazaire, Les grands groupes, comme STX et Airbus, partagent avec nous la conviction qu’un ancrage local leur est profitable » ©CCI Nantes
« Pour initier ce genre de démarche, il faut réunir un certain nombre de prérequis », prévient Stéphane Drobinski. Le responsable du département Innovation et Industrie, service en charge du Club stratégie achat de la CCI Nantes Saint Nazaire, intervenait dans le cadre de l'atelier « Made in local ».
« D'abord, les grands groupes partagent avec nous la conviction qu’un ancrage local est profitable au territoire mais aussi à leur propre développement. Nous sommes sur un territoire XXL sur lequel on fabrique des paquebots, des avions (tronçons centraux A320, ndlr) des éoliennes bientôt avec EDF … , où sont présents depuis longtemps les grands groupes avec leurs centres de décisions : Airbus, STX (Chantiers de l’Atlantique, demain Fincantieri) … Donc on a un tissu historique de sous-traitants actifs, une collaboration déjà installée, et où il est important que les grands groupes puissent se sourcer. Nous sommes aussi sur un terrain de jeu "à la nantaise", où les acteurs savent jouer collectif, quels que soient le bord politique ou la structure. Il faut être sur ces bases-là pour faire local ».
Le club, qui regroupe 21 membres acteurs et privés (STX, Airbus, Armor Lux, Manitou, CHU, EDF, DCNS, Total, Vinci, Société générale...) totalisant 3 Md€ d’achats locaux, œuvre pour « inverser la courbe entre la part des achats locaux et nationaux ».
Pour l’heure, les porteurs du projet ont observé que le panier est moins percé : « les achats locaux restent un peu plus sur le territoire qu’ailleurs mais surtout on a calculé que l'on préservait ainsi 25 000 emplois », défend Stéphane Drobinski, qui ne cache pas ses inquiétudes initiales.
« Quand on a lancé un questionnaire auprès des PME sur leurs relations avec les grands groupes. On s’attendait à être immergé par un flux de mécontentements. Ce n’est pas du tout ce qui s’est passé. Le vrai sujet remonté par les patrons de PME est : "aidez-nous à être un peu plus en communication avec les grands groupes". Quand on organise des plénières pragmatiques de trois heures pendant lesquelles EDF explique concrètement comment les PME peuvent les aider concrètement à relever ses défis sur les énergies en mer, la satisfaction est totale de part et d’autre ».
C’est d’autant plus crucial, estime-t-il, que l’on est en train de changer d’ère et que le sujets d’inquiétude des dirigeants des grands groupes à l’égard des patrons de PME est : « vont-ils nous suivre en investissant dans la robotique, la réalité virtuelle et augmentée et toutes les technologies de l'industrie 4.0 »
Comment passer de l’entreprise-mécène à l’entreprise-pollinisatrice
« Le développement socio-économique des territoires sur lesquels nous sommes installés est une des 19 priorités du groupe », enchâsse en langage très corporate Marie-Line Vaiani, directrice générale de Une rivière, un territoire, le pôle Énergies renouvelables (ENR) d’EDF qui ambitionne d’atteindre 50 GW de puissance installée en ENR d’ici 2030 grâce à un investissement de 2 Md€ par an.
Il faut attendre un peu plus loin, dans son intervention, pour un parler plus vrai.
« C’est quoi pour moi une entreprise pollinisatrice ? c’est une entreprise qui a la conviction, pas forcément prouvée au départ, qu’en travaillant localement, elle arrivera à créer des retombées économiques importantes pour le territoire mais aussi des bénéfices réels pour elle. Pour notre part, cela nous a permis de renforcer un écosystème industriel local sur des segments de la chaîne de valeur de nos métiers où il y avait un vrai besoin de performance et de disponibilité locales. Quand vous devez réaliser la maintenance des conduites forcées, qui sont des travaux particuliers, où on a besoin d’interventions rapides, d’une expertise pointue, il est essentiel que l’on ait ce type de compétences pas trop éloignées de nos aménagements hydroélectriques. J’ai plusieurs exemples où le local est juste essentiel à notre performance industrielle et l’on ne s’en rend compte que quand ils sont en tension ou disparition », lâche-t-elle.
La représentante du groupe concède que les grands groupes ont été confrontés ces dernières années à des achats centralisés par recherche de massification et qu’ils sont soumis à des directives achats qui complexifient l’accès aux PME.
« Les entreprises nous disent : vous êtes une forteresse incompréhensible et on ne peut pas passer des heures à trouver le bon interlocuteur, le bon moment…On s’est dit que le travail à faire pour rendre notre organisation plus accueillante ne reposait pas forcément sur un investissement financier mais de mettre plus d’intelligence ».
Le groupe, à la fois confronté à des enjeux d’innovation (domaines à forte évolution technologique, mondial et rapide) et industriels forts (exploitation et maintenance de parcs éoliens à déployer), a remis en cause ses process en « se posant la question de sa contribution au développement du territoire autrement que par une logique de mécénat ».
Le Pôle ENR a alors lancé une démarche de co-construction, « pas à Paris », mais là où il était « le dernier acteur industriel », avec « des acteurs économiques, des PME, certains fournisseurs, d’autres pas, et des acteurs externes, spécialiste du développement économique au sens large du terme ».
L’énergéticien a commencé par réaliser une cartographie de ses achats locales et des compétences disponibles avec un système de suivi pour pouvoir mieux les utiliser dans le respect des modalités d’achats du groupe. Il s’est aussi appuyé sur les réseaux économiques locaux pour donner de la visibilité à ses marchés, ses besoins de compétences, et ses exigences de façon à ce qu’une « PME sache très vite si elle a une chance ou pas de participer à l’appel d’offres ».
Repenser l’acte d’achat : Les collectivités s’y mettent
Chritian Estrosi, alors président de Provence-Alpes-Côte d'Azur, a lancé l'an dernier un dispositif dit de « préférence régionale » destiné à favoriser l'accès des PME et TPE aux marchés publics.
Penser local. Les collectivités, dont c'est la raison d'être, s’y mettent en effet, à commencer par les régions, fortes de leurs nouvelles compétences économiques. Les annonces se sont enfilées ces derniers mois.
En novembre dernier, l'exécutif régional de la Normandie a fait connaître les grandes lignes de sa nouvelle politique en matière d'appel d'offres, s'appuyant sur les dispositions introduites par la réforme de la commande publique, « afin de faire en sorte que l'économie locale puisse bénéficier en priorité des investissements de la collectivité, évalués à quelque 300 M€ par an ».
Parmi les mesures, effectives depuis le 1er janvier 2017 : simplification des procédures, soutien à la trésorerie des entreprises attributaires de marchés normands, intégration d'une clause « apprentissage » dans ses marchés pour favoriser l'insertion des jeunes, réduction des délais de paiement à moins de 30 jours, création d'une plateforme unique de publication des marchés pour les collectivités normandes, généralisation du recours au marché public simplifié (MPS), et transmission des factures à la collectivité par voie électronique via le portail Chorus Pro, qui sera de toute façon obligatoire à compter du 1er janvier 2019.
La région Ile-de-France a également fait connaître son intention de faciliter l'accès de ses quelque 835 000 TPE et PME aux marchés publics, dont ellles seraient attributaires à hauteur de 54 % des quelque 600 M€. La région s'engage à réduire ses délais de paiement à moins de 30 jours contre 36 actuellement, également grâce à la transmission via le portail Chorus Pro. Dans la rédaction de ses marchés, la région entend en outre « exprimer le besoin sous la forme de performances et d'exigences fonctionnelles » de façon à permettre la « candidature » de solutions innovantes, auxquelles elle compte consacrer au moins 2 % de sa commande publique.
Provence-Alpes-Côte d'Azur a également adopté l'an dernier un dispositif dit de « préférence régionale » destiné à favoriser l'accès des PME et TPE aux marchés publics, avec l'objectif d’atteindre un quota de 70 % d'ici la fin de son mandat en 2021. Sur quelque 207 M€, environ la moitié des marchés publics ont été attribués en 2015 à des entreprises régionales. Une plateforme unique, achat.regionpaca.fr, regroupera tous les avis de marchés publics du territoire (départements, métropoles, mairies) dès le deuxième semestre 2017.
À Lyon, où les 663 M€ d’achats par la Métropole ont profité à 86 % à des entreprises locales et 39 % avec des PME selon les données délivrées récemment par la collectivité, il est question d'exploiter le système de l’allotissement pour les dimensionner à l’échelle d’une PME, d'informer sur les futurs achats, à un rythme semestriel et par segment de marché, d'établir un cadre type de réponse aux appels d'offres pour simplifier les procédures, de sécuriser les PME via des avances de trésorerie et un paiement avancé.
« Made in local and co-developped in France » ?
« J’espère que c’est la première marche d’un grand renversement collectif parce que j’ai ressenti ici beaucoup d’envies, d’aller plus loin, d’avancer, d’améliorer. J’ai glissé dans la liste des courses plusieurs idées que vous avez émises », a conclu la première réunion Pierre Pelouzet qui affiche un CV aussi long que cohérent (directeur achats au sein du groupe Exxon Mobil, Cegelec, SNCF, président de la Compagnie des dirigeants et acheteurs de France puis de l'Observatoire des achats responsables…). Avant d’ajouter – enfin ! - et « si on peut bannir à tout jamais les terminologies de donneurs d’ordre et sous-traitants, je crois que l’on aura déjà fait progresser beaucoup le partenariat de travail « client-fournisseur » intelligent que l’on veut créer partout en France ».
À quand donc le label « Made and co-developped in local » ? Difficile pour l'heure de déroger au « assembled everywhere »...
Adeline Descamps
* Le médiateur des entreprises, placé auprès du ministre de l'Économie, a trois missions principales : jouer les intermédiaires en cas de difficultés contractuelles ou relationnelles afin de résoudre leurs différends de façon amiable ; encourager l'adoption et la diffusion de bonnes pratiques dans les relations commerciales et contribuer à favoriser l’innovation. Le service est gratuit et dispose d’un réseau de 60 personnes, logées en régions par les DIRECCTE. Il traite aujourd’hui plus de 1 000 dossiers par an.
** 35 grands groupes ont communiqué le contact de 38 000 PME, lesquelles ont été interviewées de façon anonyme sur la qualité de leurs relations commerciales et professionnelles. L’analyse des résultats a porté sur 6 250 réponses.
Se dirige-t-on vers un référentiel des bonnes pratiques d'achats entre grandes groupes et PME sur le territoire métropolitain ? Quelques pistes Développement du sourcing local, optimisation des appels d’offres, accompagnement des TPE/PME, transformation des organisation et processus d’achats… tous ces points ont été passés en revue. Et des deux premiers ateliers de coworking, sont ressorties de très nombreuses idées. Toutes ne pourront pas, bien entendu, être retenues dans le cadre du document destiné à définir les comportements d’achats futurs du territoire métropolitain. Un document qui porte le nom de code à la CCIMP : Metropolitan Business Act. Parmi les propositions émises, quelques traits saillants.
Ces « petits riens » qui pourraient faire presque tout - Dématérialisation des marchés publics - Publications d’appel d’offres par lots - Formations juridiques et commerciales aux TPE - Rendre plus lisible l’organisation des achats internes des grands groupes - Forums et rencontres de partage des besoins à moyen terme et long terme - Mettre en place un dialogue régulier avec les PME-clefs pour les mobiliser très en amont de façon à intégrer les moyens technologiques nécessaires - Lever les freins psychologiques, côté PME, notamment sur les achats publics : « c’est joué d’avance » ; « les appels d’offres, trop compliqué » - Lever les freins psychologiques, côté grands groupes, notamment sur la solvabilité et pérennité des PME, leur respect des délais, leur capacité de production et gestion de la logistique et … vaincre l’appréhension d’accroître leur dépendance économique (question sous-jacente : faut-il autoriser ou pas la dépendance économique temporaire ?) - Donner de la souplesse : allégement des procédures de référencement et des documents demandés, sélectionner les offres selon le coût global de l’achat ...
Ce qui pourrait changer dans l’organisation interne des grandes entreprises - Mutualisation des moyens de veille entre entreprises - Adopter une politique d’achat local (avec un % affiché) avec des critères de choix favorisant l’achat local - Mobiliser en interne les différentes directions pour infuser la « culture » collaborative avec les PME - Faire de la veille sourcing pour développer ses propres réseaux et identifier les PME-clefs - Cartographie des compétences locales - Meilleure projection sur la stratégie d’achat à 5 ans pour offrir plus de visibilité aux PME - Action de sourcing PME en amont de la préparation de tout cahier des charges - Création d’un portail achats sur le site de l’entreprise - Accompagner les fournisseurs pour les faire monter en compétences de façon à ce qu’ils puissent répondre aux procédures AO tout en veillant à simplifier les procédures - Organiser des « Journées portes-ouvertes Achats » - Gérer la propriété intellectuelle associée aux brevets avec le sous-traitant dès le départ
Ce qui bloquent les grands groupes - Manque de compétences réglementaires, de ressources humaines, de disponibilité pour répondre en conformité aux appels d’offres - Capacité financière pour faire face aux délais de paiement - Non-respect des engagements et des délais - Manque de compétitivité des PME dans leur offre
Ce qui pourrait être fait … à court terme - Annuaire professionnel par filières - Plateforme /portail de communication - Business speed dating spécialisés par filières avec formation en amont des fournisseurs par les instances locales pour bien répondre aux besoins des acheteurs - Création d’une marketplace par filières - Développer des outils pour repérer rapidement les entreprises locales avec une dynamique RSE (responsabilité sociale et environnementale) - Réaliser un suivi pour mesurer l’efficacité des actions et identifier forces et faiblesses dans le temps.
… Et à plus long terme - Favoriser les partenariats et /ou regroupements et alliances d’entreprises - Opter pour des marchés réservés en intégrant des clauses d’insertion
Il a été peu question pour l'instant (mais les travaux se poursuivent ...) de : - utiliser la procédure de médiation avant le recours aux tribunaux - Comparer les actions menées et leurs résultats avec ceux d'autres grands comptes - Gérer les pénalités de retard de manière concertée et proportionnelle aux enjeux - Introduire la possibilité de verser des avances sans demander de caution financière - S’engager sur un minimum de commande ferme - Soutenir le développement international
Plus d'info / s'engager : www.ccimp.com/mba
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Les commandes publiques et privées en quelques données éclairantes
200 Md€ : Le montant de la commande publique par les collectivités, Etat, entreprises publiques, concessions…
58 % : La part des PME attributaires mais 30 % en valeur
24,5 jours : Le délai moyen dans la sphère publique (Etat, hôpitaux, collectivités locales)
22 % : La baisse des investissements publics en trois ans
67,5 milliards d’euros : La valeur des marchés d’un montant supérieur à 15 000 euros
10 millions (2015) : Le nombre d'heures de travail généré par clause sociale d'insertion dans la commande publique
21,9 Md€ : Le montant des achats effectués par les grands comptes auprès des PME (pour 90,6 Md€ dépensés au total)
24,3 % : La part des PME dans les achats des grands comptes
46,1 jours : Le délai moyen de paiement opéré par les grands comptes de Pacte PME
1 162 : Le nombre de projets collaboratifs innovants qui sont menés entre un grand compte et une PME
859 M€ : La part des achats d’innovation aux PME par les grands comptes
235 : Le nombre de PME considérées comme clefs ou stratégiques par les grands comptes
475 M€ : Le montant dépensé auprès de ces PME clefs
47 % : Le % estimé en pertes de revenus pour les PME dus aux retards de paiement
5 et 7 jours : Retard moyen de paiement en Europe, respectivement dans le privé et dans le public
1 sur 3 : Le nombre de PME qui déclarent se protéger contre les impayés
Sources : Infographie réalisée sur la base de diverses données émanant des observatoires de : Assemblée des communautés de France et la Caisse des dépôts et consignations ; Alliance Villes Emploi, Association nationale des collectivités territoriales pour la formation, l'insertion et l'emploi ; Observatoire de Pacte PME ; Observatoire des délais de paiement de la DGFiP, European report payment