Conjoncture économique : De l’optimisme dans une cascade d’incertitudes

« Jusqu’ici, tout va bien… » : le titre, attribué par la CCI métropolitaine Aix-Marseille-Provence à sa note de conjoncture en cette rentrée 2022, résume l’état d’esprit du panel de 368 chefs d’entreprises interrogés jusqu’au 9 septembre dernier sur l’impact des différentes crises (guerre Ukraine-Russie, énergie, inflation, pénurie de matières premières et de compétences…) sur leurs activités. « La confiance reste là, mais la vigilance s’impose pour la fin 2022 – début 2023 » confie Maurice Wolff, élu de la CCIAMP, lors de la présentation le 3 octobre de l’enquête trimestrielle réalisée par les équipes de la Chambre consulaire.

62% se disent en effet assez ou très confiants pour leur entreprise sur cette deuxième moitié de l’année. Le 2^e trimestre atteste du rebond d’activité dans les différents secteurs, l’été a été favorable pour les professionnels du tourisme (57% déclarent une hausse d’activité en hôtellerie-restauration), les diverses primes et aides de l’Etat ont permis de mieux partager la valeur ajoutée avec les salariés… Au point, selon le Secrétaire général de la Préfecture des Bouches-du-Rhône, Yvan Cordier, convié à introduire les échanges, que le département enregistre une progression des chiffres d’affaires bien supérieure aux moyennes régionale et nationale ! 

Confiant en local, plus circonspect en national

Mais les mois qui viennent s’annoncent des plus incertains avec une inquiétude majeure sur la hausse des prix de l’énergie, voire la régularité des approvisionnements, les négociations annuelles obligatoires qui laissent entrevoir une accentuation de la pression pour une augmentation des salaires, la difficulté de répercuter l’explosion des coûts de revient sur l’aval de sa chaîne et au bout sur la clientèle, la fragilisation des trésoreries au moment où il faut rembourser le PGE… Maurice Wolff note cependant une « ambivalence » dans les perceptions des dirigeants : « Ils continuent à avoir confiance dans l’économie métropolitaine, mais semblent plus interrogatifs vis-à-vis de la situation nationale ». Fort d’une vision plus élargie, collectée auprès de centaines d’entrepreneurs régionaux de l’industrie, des services et du BTP, Jean-Christophe Ehrhardt, directeur régional Provence-Alpes-Côte d’Azur de la Banque de France, confirme avoir noté « une remontée brute de l’inquiétude en septembre, principalement liée à la non-visibilité sur les prix de l’énergie » mais les chiffres recueillis démontrent combien l’économie régionale reste « résiliente ». L’industrie affiche + 9,2% sur les chiffres d’affaires, + 7,7% sur les exportations et + 1,8% sur les effectifs. Les services s’inscrivent également sur des tendances en progression, à savoir + 10,3% sur les chiffres d’affaires et + 3,3% sur les effectifs. Pour la construction, la croissance apparaît plus limitée à + 4,4% en chiffre d’affaires et + 1,1% sur les effectifs, mais elle existe néanmoins. Quant aux investissements, les trois secteurs les projettent à la hausse sur les mois à venir. Signe d’un optimisme persistant. 

Du sens pour oser voir plus loin

Pour Eric Sella, adjoint au responsable des affaires régionales de la Banque de France, l’enquête révèle des craintes avérées sur la diminution des marges et de la rentabilité globale pour faire face à la conjonction simultanée des dérives de coûts. Les plus petites structures devraient en souffrir le plus. L’enquête de la CCIAMP fait ressortir que « 71% des entreprises se disent encore plus attentives qu’habituellement à leurs charges et 27% estiment que l’inflation pourrait avoir des conséquences sur leur viabilité ». Mais s’il admet que « la Banque de France trace des perspectives de moins en moins optimistes compte tenu de tous les aléas géopolitiques et des prix qui s’envolent », Jean-Christophe Ehrhardt assure qu’il ne s’attend pas « à un tsunami de défaillances ».

Invité à exprimer en conclusion le point de vue des entrepreneurs les plus jeunes, Guillaume Rollet, de la section aixoise du Centre des Jeunes Dirigeants (CJD), a évoqué le recrutement comme leur préoccupation numéro 1 et la nécessité, pour n’importe quel dirigeant de société, de savoir proposer « du sens, de l’écoute et des valeurs » à ses collaborateurs. Parce que c’est aussi vecteur de confiance pour en attirer de nouveaux. Et pour l’avenir même des entreprises. 

Consulter la conjoncture métropolitaine du 2e trimestre 2022